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Il aura fallu plus de 10 ans pour que la zone commerciale de L’Île Roche voit le jour à La Paccoterie. Un an après son ouverture, et malgré la crise sanitaire, tous les voyants sont au vert.


Fabrice Dumartin est président des Arches Métropole. Après la revente du patrimoine immobilier de L’Île Roche, il tire un bilan positif de l’opération financière.

C’est un des projets les plus décriés de Sallanches, qui a mis plus de dix ans à voir le jour. D’abord dénommé Grand Mont-Blanc, puis The Snow, c’est finalement sous le nom de L’Île Roche que la zone commerciale ouvrait le 14 octobre 2020 sur le lieu-dit de La Paccoterie. Un an après, quel bilan tirer de cette opération ? Fabrice Dumartin, président des Arches Métropole (promoteur de L’Île Roche) fait le point.

Quel bilan financier tirez-vous de l’opération ?

On en tire évidemment un beau bilan financier, et heureusement qu’on arrive à gagner notre vie sur un projet qui a mis 10 ans à voir le jour. Sur ce dossier, on a eu deux obstacles : les recours et la crise sanitaire. Mais quand on est capable d’offrir des espaces de qualité avec des commerçants de qualité, ça fait toute la différence.

Pourquoi vous être lancés dans cette opération, connaissant les oppositions au projet ?

Au début, nous n’étions pas au fait des problématiques. C’est l’enseigne Intersport qui nous a contactés en 2010, elle souhaitait être transférée sur ce site. Ensuite on a eu connaissance des oppositions de certains commerçants et associations de protection de l’environnement, mais rien ne nous semblait irréversible. Quand on est arrivé sur ce dossier, ce climat d’animosité nous était étranger, ça nous a permis d’ouvrir une discussion avec les opposants. Finalement nous avons gagné en CNAC (Commission nationale d’équipement commercial).

Quel a été le coût de l’opération ?

Entre l’acquisition du foncier et les travaux, ça nous a coûté près de 30 millions d’euros. C’est assez élevé pour un environnement commercial qui n’est pas exceptionnel. C’est un petit bassin de vie et le foncier est aussi cher que dans la banlieue de Nancy, de Rennes ou de Toulouse, des villes avec une attractivité commerciale bien plus forte. Là, il fallait créer une force commerciale dans la zone. En outre, les travaux ont coûté très cher car le terrain était très humide.

Avez-vous eu des difficultés pour louer les cellules commerciales ?

Pas du tout, tout s’est loué assez rapidement. Si on compare les prix de location des cellules commerciales dans d’autres villes de même taille, L’Île Roche est plus chère que les autres, mais tout de même en dessous des prix pratiqués en région parisienne. De toute façon les enseignes connaissent parfaitement les marchés, nos clients ne prennent pas une cellule pour le plaisir. La décision est prise en fonction du résultat potentiel à la fin. Un certain pourcentage de leur chiffre d’affaires est dédié au loyer, et elles ne vont pas au-delà. Elles savent que ce bassin de vie est une poche économique exceptionnelle avec une population à fort pouvoir d’achat. La fréquentation est importante et ce n’est pas une surprise.

À qui avez-vous revendu ?

De notre côté nous tirons un bilan économique positif de cette opération, nous venons de revendre à Pascal Garcia, un garçon qui est dans l’immobilier à Annecy. On aurait pu vendre à des foncières immobilières internationales, mais nous avons privilégié un profil local, un relais physique pour l’ensemble des commerçants.

En 2020, les consommateurs étaient au rendez-vous malgré la crise.

Si les résultats diffèrent légèrement selon les enseignes, dans l’ensemble, elles tirent presque toutes un bilan positif. Chez Utility, qui a quitté le centre-ville pour L’Île Roche, les voyants sont au vert. « On est tout à fait dans le prévisionnel qu’on s’était fixé alors qu’on a fermé plus de 2 mois et qu’on a subi 3 mois de couvre-feu à 18h. On retrouve nos clients du centre-ville, même ceux qui étaient contre le projet, et on a plein de nouveaux clients», confie le patron, Grégory. Pour Jean-François, gérant de l’enseigne Courir, même constat. « On a fait une belle ouverture, et la fréquentation s’est confirmée sur le reste de l’année. On est au-dessus des chiffres qu’on s’était fixés ». Pour Tape à l’œil, qui a déménagé de Carrefour Cluses pour s’installer à Sallanches, les chiffres sont légèrement moins bons, mais rien d’alarmant. «On a un bon flux de clients, la plupart des habitués de Cluses viennent jusqu’à Sallanches et on a une nouvelle clientèle, des gens de la vallée qui nous attendaient. On n’est pas tout à fait dans les clous par rapport au prévisionnel, mais on n’est pas inquiet », confie Lucille, responsable du magasin.

Jean-François, gérant du magasin Courir, confie avoir dépassé ses objectifs en termes de ventes.

Un peu moins de succès pour l’alimentaire

Du côté de l’alimentaire, le succès est plus timide. «Forcément, le côté bar n’a pas très bien tourné, mais on a compensé avec la cave. On est bien au-dessus du prévisionnel sur la partie cave», explique Gaëtan, caviste du V&B. Si la boulangerie Chevallier constate également une bonne fréquentation, du côté de La crémerie du Mont-Blanc, ouverte depuis avril, la clientèle se fait attendre. « On a du monde les vendredis et samedis mais sinon c’est assez calme», regrette Océane, une employée.

Dans les magasins de L’Île Roche, les clients ont des profils très divers.

Des clients de la vallée et d’ailleurs.

Dans les rayons des différentes enseignes, les consommateurs ont des profils différents. Magalie, qui habite Thônes, n’avait pas l’habitude de consommer à Sallanches. «Je ne viens pas souvent mais c’est agréable ici, c’est facile d’accès ». Jean-Claude, qui vit à Chamonix, a un profil similaire: «Je venais pour les courses de temps en temps à Carrefour et je me suis toujours dit que ce type de zone commerciale manquait ici. Maintenant je viens un peu plus souvent». Sylvain et Karine, anciens Sallanchards installés à Bonneville, viennent souvent à L’Île Roche. «On vient une fois par semaine à Sallanches et on consomme toujours dans les commerces du centre-ville, on vient ici pour acheter ce qu’on ne trouve pas ailleurs ».

« C’est complémentaire de l’offre du centre-ville »

Anne-Claire, qui vit à Chedde, vient pour les mêmes raisons. «Je trouve que c’est complémentaire de l’offre du centre-ville où on va trouver des boutiques plus atypiques. Je vais toujours consommer au centre-ville de Sallanches, à la parfumerie, à la librairie, au café. Ce que je viens chercher ici, avant j’allais le chercher à Scionzier où on retrouve les mêmes enseignes qu’à L’Île Roche ».

Au centre-ville, « rien n’a vraiment changé »

Du côté des commerçants du centre-ville, qui appréhendaient beaucoup l’arrivée de L’Île Roche, la grogne semble avoir laissé place à l’apaisement. «On ne propose pas les mêmes choses, on sait se différencier, nos clients sont restés fidèles», confie une commerçante d’une boutique de vêtement. «Honnêtement je ne vois pas de différence, les marques qu’on propose ne sont pas vendues là-bas », ajoute Elliot de la boutique Next. «Ma fréquentation a même augmenté. Je suis contre ces zones commerciales qui participent à faire fuir les gens des centres-villes, mais, en ce qui me concerne, rien n’a vraiment changé », ajoute une commerçante. Pour Agnès, patronne de la librairie Livre en tête, il y a tout de même une baisse de fréquentation. « Au départ les gens sont restés fidèles mais depuis juin la fréquentation n’est pas très bonne. Après je ne sais pas si c’est parce que la Fnac est installée à l’Île Roche, mais cet été on n’a pas eu la foule habituelle ». Pour Sébastien, de la boutique de trail Le Talon d’Achille, rien à signaler. « Nous n’avons ressenti aucun changement, notre chiffre d’affaires augmente chaque année, nous ne sommes pas sur la même gamme de produits, nous sommes très spécialisés». Idem pour Valentin, de Chez Krys : «On avait des craintes mais elles ne se sont pas vérifiées, les clients sont restés fidèles ».

Malgré les inquiétudes, les commerces du centre-ville
ne semblent pas avoir été impactés par l’arrivée de L’Île Roche.

Bientôt deux nouvelles enseignes

Si le déménagement de l’Entrepôt du Bricolage dans sa nouvelle cellule sera effective le 21 octobre, deux autres enseignes sont également en cours d’installation.
« Une cellule accueillera conjointement Darty cuisine et salle de bain et Cinna, elle devrait ouvrir durant la première semaine de novembre. Et la dernière enseigne à s’installer est un concurrent de Maisons du Monde, c’est une toute nouvelle marque d’Annecy qui s’appelle Zago et qui propose du mobilier et de la décoration. Maisons du Monde devait initialement s’installer à L’Île Roche, et les gens ont été très déçus qu’ils ne viennent pas. Avec Zago, on répond à la demande des consommateurs en valorisant une marque locale », explique Fabrice Dumartin, président des Arches métropole.